Quarante ans après la grande rupture marquée par les commentaires classiques de Sylvain Zac, Martial Gueroult, de Gilles Deleuze et d’Alexandre Matheron, ce volume fait le point sur les nouvelles approches de l’œuvre de Spinoza : de nouvelles lectures sont apparues, de nouvelles méthodes ont été éprouvées, des rapprochements inédits avec la littérature, les sciences sociales, le droit, l’économie ou la politique ont permis de déchiffrer la philosophie de Spinoza autrement.
Jusqu’au milieu des années soixante, l’écho de la philosophie de Spinoza se trouvait divisé entre, d’une part, une réputation de difficulté et d’opacité et, d’autre part, une figure support de légende et semblait n’avoir guère de rapport avec, par exemple, le développement contemporain des sciences humaines. Pourtant, au sein même de celles-ci, certains pouvaient s’en inspirer silencieusement, de même que certains écrivains le mentionnaient ou le faisaient apparaître dans leurs œuvres ; mais cette inspiration et ces apparitions ne faisaient pas l’objet d’une reprise problématique du côté des philosophes.
Il importe donc de rendre au spinozisme sa spécificité et sa rigueur en tant que philosophie, et de mesurer sa capacité à étendre son questionnement hors du champ proprement philosophique. La recherche tend à actualiser Spinoza : prendre au sérieux son intérêt pour les sciences de la nature, de la vie et de la société – et réciproquement découvrir l’intérêt que peut présenter pour ces disciplines la lecture de Spinoza. Autrement dit : à la fois interroger Spinoza sur son rapport à ces matériaux, et prendre en vue ce que l’état actuel de ces pratiques ou ces disciplines peut gagner à une confrontation avec le spinozisme. En somme : Spinoza à l’intérieur et à l’extérieur du spinozisme.
PARTIE I : SPINOZA, NOTRE CONTEMPORAIN
Henri ATLAN : Un point de vue spinoziste sur
l'Évolution et la théorie de l'action : de la philosophie
analytique à Spinoza
Chantal JAQUET :La référence à la conception
spinoziste des rapports du corps et de l'esprit dans
l’ouvrage de Paul Ricoeur et Jean–Pierre Changeux, Ce
qui nous fait penser. La nature et la règle
Pascal SEVERAC : Le Spinoza de Bourdieu
Frédéric LORDON : Spinoza et le monde social
François MATHERON : Louis Althusser et le « groupe
Spinoza »
Gabriel ALBIAC : Sujets déterminés : entre Althusser
et Lacan, Spinoza
Claude COHEN-BOULAKIA : Spinoza, l’antihumanisme
contemporain
PARTIE II: LA CONSTITUTION DU SPINOZISME
Françoise BARBARAS : Le fondement mathématique de
la puissance de modération des sentiments
Fabrice AUDIÉ : Spinoza et les mathématiques
Épaminondas VAMPOULIS : Problèmes de la
conception de la nature corporelle chez Spinoza
Laurent BOVE : « Bêtes ou automates ». La différence
anthropologique dans la politique spinoziste
Nicolas ISRAËL : Finitude et singularisation
Jacqueline LAGRÉE : Spinoza et la foi du philosophe
Lorenzo VINCIGUERRA : « Le geste de Dieu ».
Origine et nature du signe chez Spinoza
Manfred WALTHER : Souveraineté du peuple et état
d’exception. Spinoza dans la théorie de l’État de la
république de Weimar
Elhanan YAKIRA : Spinoza et la politique
François ZOURABICHVILI : La langue de
l’entendement infini
Mogens LAERKE : Sur l’emploi des particules
réduplicatives dans l’Éthique
Pierre-François MOREAU : La narrativité dans
l’écriture de Spinoza
PARTIE III : LES MONDES DE SPINOZA
Ahmed ALAMI : Spinoza et Averroès
Mino CHAMLA : Spinoza et la lecture talmudique de la
Bible
Salah MOSBAH : « Ultimi Barbarorum… ». Spinoza et
la tradition républicaine
Henriette BESSIS : La peinture en Hollande au temps
de Spinoza
Yves CITTON : Spinoza et Quesnay : l’envers du
libéralisme
Fatma HADDAD CHAMAKH: L’actualité du Traité
théologico-politique de Spinoza. Pour une lecture
critique des textes des « Renaissants » arabo-
musulmans de la fin du XIXe à la fin du XXe siècle